Raphaël Saleh est juge international 5* et représentant pour l'Europe au bureau du Club International des Officiels de Dressage.
Le "collectif pour les chevaux" est un groupe qui s'est fait connaître en publiant des vidéos critiques sur le dressage de compétition.
Retrouvez l'interview de Raphaël Saleh réalisée pour le CFJD par Bernard Maurel.
Pourquoi avoir invité 2 représentantes de ce groupe à l'Assemblée générale de l'IDOC (International Dressage Official Club) ?
Ayant eu l’occasion de rencontrer la représentante française lors du concours international de Compiègne, avec Charles Trolliet (ancien président de la Fédération Équestre Suisse et vétérinaire), elle nous a présenté des vidéos de chevaux mal entrainés et de cavaliers qui se comportaient mal. La discussion a été constructive : nous avons les mêmes objectifs de protection du cheval et de son bien-être. On veut voir des chevaux bien montés et respectés.
Il m’a paru judicieux, comme le bien-être du cheval est un sujet fort, de ne pas « faire l’autruche » et d’avoir une discussion avec des gens qui ne sont pas contre le fait qu’on monte à cheval. Il est intéressant également d’échanger pour de vrai et de montrer que les juges sont concernés.
Leur présentation nous paraît négative et "à charge" contre les juges et les stewards. Est-ce la meilleure façon de défendre les bons principes ?
Ce n’est pas ainsi que se pose la question. Lors du meeting IDOC les 2 représentantes du collectif ont été assez ouvertes. Il y a des solutions communes, pour les stewards en particulier. Sur les vidéos des détentes de Compiègne et du Mans, on ne peut qu’être d’accord avec elles. Mais il y a des divergences : elles sont absolument strictes quand les chevaux passent derrière la verticale ; il leur manque donc la notion correcte de la connexion du dos et du travail juste. Mais ces échanges sont fructueux, car globalement nous sommes sur la même longueur d’onde.
Pensez-vous possible de faire passer auprès des juges et des stewards leurs critiques de manière positive ? Si oui, comment ?
C’est tout à fait possible, dans la mesure où on est capable de trouver ce qu’est une équitation correcte. Exemple : une encolure longue, mais avec un cheval irrégulier est aussi un souci !
Sur le sujet de la biomécanique, il faut garder à l’esprit que les cavaliers de haut niveau et les entraineurs cherchent à avoir des chevaux corrects et dans une bonne attitude. Lors du dernier séminaire des juges FEI 5* début février nous avons eu une intervention du Dr Rachel Murray avec de nombreux points utiles. Par exemple, elle rappelle que la tête du cheval est lourde et son encolure longue, ce qui implique la nécessité d’une gymnastique globale.
Pour faire passer ce message, nous avons besoin d’un processus d’éducation pour cavaliers, entraineurs et juges. L’intervention du collectif à l’IDOC était positive car c’était une séance pratique. Ses 2 représentantes ont pu se rendre compte que les juges sanctionnent les mauvaises attitudes et les cavaliers qui ne sont pas corrects.
Mais le problème n’est pas seulement sur les rectangles, et ne concerne pas seulement les chevaux de haut niveau. L’attitude n’est qu’un élément d’un sujet plus général, dont la clé est l’éducation.
Propos recueillis le 16 mars 2023